François Curlet Insert Jef Geys
Country clic
05.04 – 01.06.2014
Knacking pour Country clic
Sur le parking du centre commercial les enfants collent leur museaux sur les vitres des voitures fraichement parquées, sortes d’apprentis vitriers munis de leur ventouses naturelles, suçons précoces de la convoitise des consommateurs. Ils sont ready.
La pièce factice glissée dans le cadenas de la chaine du caddy, la mini communauté est prête pour son rallye à coup de carte Cofinoga. Une expédition polaire pour l’imaginaire, le centre culturel Leclerc donne le change avec la sélection France loisir et France inter. Tickets d entrées pour les Zénith affichés à la criée au Velleda : Zwip un coup de peau de chamois, on programme le prochain trimestre.
Les vendeuses du rayon électroménager mettent en garde contre les produits chinois, le made in franco-tunisien est conseillé.
Quelques centaines de kilomètres plus loin, une foire, couverte. Une foire d’art avec des stands loués chers et des oeuvres fleurants bon l originalité et l’unicité, ou presque, à trois ou cinq exemplaires près. Les allées sont agrémentées de petits panneaux identifiants les noms des vendeurs, des sortes de têtes de gondoles VIP. Il y a peu d’enfants ventouseurs par ici, mais une population habillée dans les mêmes tons, un style magazine international arpentant les allées dans les deux sens. Les genres varient en fonction de leur pouvoir d’achat. Il y a ceux qui viennent offrir le service persuasion oral sur les objets exposés, les auteurs parfois viennent directement sur le stand et font office de monsieur œnologie, les mêmes que l’on trouve dans les sections grands crus des supers carrefour, le noeud pap en moins. Parmi les supporters des trentenaires, habillés en direct de Brooklyn : les hipsters par procuration. Clients modestes mais diffuseurs de tendance à la façon des abeilles qui pollinisent les pistils en attente nez au vent. Il communiquent rapidement d‘ailleurs : « salut toi tu vas bien … j’ai adorée ta pièce. »
Les plus importants dans la mécanique de choix qui se colportent autant par les yeux que les oreilles, sont les advisers, sortes de doryphores jonglant sur les patates en robe de chambre prêtent à se faire éplucher. Les curators sont bien aux rendez vous aussi et ponctuent le flux régulier des visiteurs. Certains, experts et employés patentés permettent d’articuler des œuvres au travers d’expositions collectives en dessinant des fils imaginaires, proposant une communauté d’esprit spontanée et calculée en même temps. Beaucoup de wannabe curators se font passer pour des bergers mais en regardant bien les pattes, les sabots du mouton apparaissent facilement. Ils sont là pour en être et se faire tondre, tout le monde trouve sa place.
Le magnétisme de l’oeuvre collective anonyme, le produit industriel, ou individuel, quand il est témoin d’une heureuse chaine d’élaboration due à une recette étrange reste un plaisir, c’est ce qui fait tourner l’ensemble du manège à la base même si dans le feu de l’agitation ce but s’estompe nettement. Des auteurs toujours prêts à se tirer la couverture par manque de signes distinctifs commencent à mordre quand le troupeaux se disperse ou se rassemble. Enfoncés dans le présent à force de viser l’avenir le temps est compté en dates de péremption. Une commedia dell’arte sans obligation d’avaler la pizza.
Un dénominateur commun embroche tous les protagonistes : celui de candidat.